Ce dimanche 1ᵉʳ décembre 2024, le Sénégal marque une journée mémorable avec la commémoration officielle du 80ᵉ anniversaire du massacre des tirailleurs sénégalais, survenu en 1944 au camp militaire de Thiaroye. Cet événement tragique est l’un des épisodes les plus sombres de l’histoire coloniale française en Afrique.
La cérémonie officielle, présidée par le chef de l’État sénégalais Bassirou Diomaye Faye, se déroule en présence de plusieurs chefs d’États africains, dont Mohamed Ould Ghazouani, président en exercice de l’Union africaine et de la Mauritanie, Adama Barrow de la Gambie, Umaru Sissokho Embaló de la Guinée-Bissau, Brice Oligui Nguema du Gabon, et Assoumani Azali des Comores.
Le Premier ministre, Ousmane Sonko, ainsi que des membres du gouvernement, des représentants des forces armées, des élus, et des diplomates étrangers participent également à cette cérémonie. Des délégations venues de France, Cameroun, Djibouti, Tchad, et Burkina Faso sont présentes pour rendre hommage aux victimes de ce drame.
Le 1er décembre 1944, des tirailleurs sénégalais démobilisés, regroupés dans le camp militaire de Thiaroye après avoir combattu pour la France pendant la Seconde Guerre mondiale, sont abattus par l’armée coloniale française. Ces soldats réclamaient le paiement de leurs soldes et indemnités promises pour leur service dans la libération de la France.
Les récits officiels français parlent de 35 à 70 morts, mais des historiens, comme le Sénégalais Mbaye Guèye, avancent des bilans beaucoup plus élevés, estimant à 191 morts ou plus le nombre de victimes. L’historienne Rokhaya Fall souligne que les archives militaires françaises n’ont pas encore été pleinement ouvertes, rendant difficile une évaluation précise de l’ampleur de la tragédie.
Les tirailleurs sénégalais, créés en 1857 par le général Louis Faidherbe, ont servi comme troupes coloniales pour la France dans de nombreuses guerres, notamment les deux Guerres mondiales, et les conflits en Indochine, en Algérie et à Madagascar.
Pendant la Première Guerre mondiale, 200 000 tirailleurs originaires d’Afrique de l’Ouest ont été mobilisés, dont 30 000 ont péri sur les champs de bataille européens. Leur rôle crucial s’est poursuivi lors de la Seconde Guerre mondiale, où ils ont contribué à des victoires majeures, comme la libération de Toulon en août 1944.
Malgré leur contribution héroïque, ces soldats ont longtemps été marginalisés dans les récits historiques. Le massacre de Thiaroye symbolise cette injustice, à la fois en raison de l’atrocité des faits et du silence prolongé qui a suivi.
Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a réaffirmé l’importance de la vérité et de la justice historique. La présence de plusieurs chefs d’État africains et de délégations internationales témoigne d’une volonté collective de raviver la mémoire des tirailleurs et de leur sacrifice pour des idéaux universels.
Cette commémoration du 80ᵉ anniversaire du massacre de Thiaroye n’est pas seulement une réflexion sur le passé. Elle constitue aussi un appel à une reconnaissance historique complète et à l’ouverture des archives militaires françaises pour que toute la lumière soit faite sur cette tragédie.
En honorant la mémoire des tirailleurs, le Sénégal et ses partenaires internationaux rappellent l’urgence de préserver l’histoire et de tirer les leçons d’un passé partagé, marqué par le sacrifice de ceux qui ont combattu pour la liberté et la justice.