Une récente étude menée par l’organisation ChildFund dresse un constat alarmant sur la situation des enfants et des jeunes en situation de mobilité au Sénégal. Selon ce rapport, 62,5 % d’entre eux sont exposés à des risques d’exploitation économique et sexuelle. L’étude met en lumière les nombreux défis auxquels ces jeunes, âgés majoritairement de 15 à 23 ans, sont confrontés : absence d’accès aux soins de santé, à l’éducation, et exposition à des dangers souvent mortels liés à des déplacements non encadrés.
Cette étude, fondée sur des données recueillies auprès de 1 004 enfants et jeunes, de 170 acteurs communautaires et de 35 institutions à travers le pays, offre un aperçu détaillé des motivations et parcours de ces jeunes, qui quittent souvent leurs foyers à la recherche de meilleures opportunités ou pour fuir des situations critiques comme les conflits, les violences basées sur le genre ou les catastrophes naturelles.
Parmi les principaux facteurs de départ, 39 % des jeunes évoquent la volonté d’échapper à la pauvreté, tandis que 16,6 % sont influencés par les attentes liées à la dot. D’autres cherchent simplement à gagner leur autonomie ou vivre une aventure.
Les filles en mobilité sont les plus exposées aux risques de violences sexuelles et d’exploitation. Dans des zones urbaines comme Dakar, 30 % d’entre elles travaillent dans le secteur domestique, et 15 % dans les services commerciaux. Chez les garçons, 18 % occupent également des emplois domestiques, 17 % dans le commerce, et 15 % sont contraints à la mendicité, une situation les rendant particulièrement vulnérables à l’exploitation et aux abus.
La majorité des enfants en situation de mobilité sont de nationalité sénégalaise (67,6 %), mais l’étude révèle également une présence significative de jeunes venus de pays voisins : Nigéria (9,5 %), Guinée-Conakry et Mali (6,9 % chacun), Guinée-Bissau (3,4 %), Burkina Faso (2,7 %), Gambie, Niger, Ghana et Mauritanie.
À leur arrivée à Dakar, seuls 2,3 % des jeunes migrants reçoivent une forme d’assistance, le plus souvent alimentaire. ChildFund alerte sur l’absence de dispositifs efficaces de protection et recommande des mesures urgentes : renforcement de la coopération entre les acteurs, mise en place de centres d’accueil, accès équitable à l’éducation, adaptation des réponses aux contextes locaux, et surtout, une sensibilisation accrue aux droits de l’enfant.
Malgré les difficultés, l’étude souligne aussi une forte résilience : 80,1 % des jeunes témoignent de comportements positifs comme la poursuite des études ou l’entraide. Toutefois, 19,9 % d’entre eux vivent un stress intense, signalant l’urgence d’un appui psychosocial renforcé.
« C’est un signal d’alarme. Nous ne pouvons pas détourner le regard alors que des milliers d’enfants franchissent des frontières et des communautés à la recherche d’une vie meilleure, pour se retrouver confrontés au danger, à l’exploitation et à la négligence », alerte le Dr Allassane Drabo, Directeur Pays de ChildFund Sénégal et Guinée. Il appelle à une action collective pour bâtir un système de protection coordonné, adapté et inclusif.