« CETTE SITUATION ÉTAIT ÉVITABLE »

Invité de l’émission POINT DE VUE, le commissaire divisionnaire à la retraite, Cheikhna Cheikh Saad Bouh Keïta estime que « si on s’y était mis à temps, il aurait été possible d’anticiper et de faire de telle sorte qu’il n’ait pas autant de dégâts durant les manifestions ».

Il assure que c’est le moment pour tout le monde de comprendre la nature de la menace, sa profondeur et l’intérêt qu’il y avait à mobiliser toutes les forces vives de la nation dans une même direction.

« La situation socio-politique à laquelle nous vivons avec des douzaines de morts, des scènes de violence, des pillages, des casses et autres attaques de maisons à l’annonce du verdict du procès Ousmane Sonko – Adji Sarr, pouvait être évité si nous nous entendions sur l’essentiel ».

Selon le commissaire, aucun Sénégalais ne doit se réjouir de voir le pays brûlé. « C’est le moment d’être unis, de se préparer et de barrer la route aux forces occultes. Ce n’est pas trop tard. Je pense qu’on peut faire encore ».

Parlant de la posture des Forces de défense et de sécurité (FDS), le commissaire Keïta affirme que le maintien de l’ordre n’est pas synonyme de « tirer sur des gens ».

A cette occasion, il appelle à l’opinion publique à ne pas entrer dans la manipulation jusqu’à taxer aux FDS de « tueurs volontaires ».

« Les FDS n’ont jamais tiré sur des gens volontairement… Utiliser les moyens dont ont dispose répond à des normes. Elles ont une responsabilité patriotique, complexe, mais surtout technique », fait savoir M. Keïta.

Expliquant l’implication des mineurs dans la foule, le commissaire à la retraite considère que c’est un phénomène nouveau qui peut être expliqué par plusieurs facteurs, notamment la promiscuité et le manque de responsabilité de certains parents et acteurs socio-éducatifs.

Commissaire Keïta évoque la présence de forces occultes pour parler d’une « entreprise de déstabilisation du pays .

« On parle de forces occultes dans un contexte d’action politique, de conquête du pouvoir. Autrement dit, des citoyens qui aspirent à diriger le pays se mettent en action et à l’occasion de leurs actions, des troubles sont provoquées. Elles aspirent à user de tous les prétextes pour créer un mécontentement », renseigne M. Keïta.

A l’en croire, les forces occultes tentent d’utiliser un prétexte pour pousser les gens à se comporte d’une certaine manière ou d’utiliser un prétexte pour créer une explosion dans un environnement… Ce sont des groupes d’individus qui utilisent la religion et l’éducation avec leur projet qui ne cherchent qu’à s’enrichir.

Le commissaire divisionnaire à la retraite a mis un lien entre ce qui se passe et le projet politique de la formation politique du parti Pastef ( les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité).

Selon M. Keïta « le projet de Pastef a très vite glissé du fait de son leader qui a toujours cherché à se positionner là où c’est facile de faire du résultat. C’est pourquoi on le trouve dans des relations extrêmement complexes. »

Au gré de commissaire Keïta, « le projet de Pastef est un projet subjectif par nature parce que son leader, M. Ousmane Sonko utilise des fibres régionalistes, ethniques, au-delà meme de cela il se ligue avec des groupes religieux de toute obédience ou d’organisations dont les traditions sont de créer des troubles pour arriver à des objectifs.

« En outre, le Pastef a utilisé la situation de la région sud du pays ( Casamance ) pour arriver à créer une situation qui pourrait lui permettre d’intervenir sur le terrain et de s’exercer de la pression avec de la violence pour arriver à mettre en place leur projet, qui n’est qu’une utopie », révèle M. Cheikhna Cheikh Saad Bouh Keïta.

Revenant sur le délibéré du juge de jeudi dernier sur l’affaire « Sweet bauty », M. Keita estime que « même si le leader de Pastef n’a pas été condamné pour viol ou menace de mort, la corruption de la jeunesse fait partie des faits constitutifs. Donc, c’est le libre-arbitre du juge qui a joué.»

« C’est le juge qui a trouvé à le sanctionner moins durement en convoquant une autre infraction qui porte sur les mêmes faits que cela qui aurait pu être considéré comme étant un viol au plan de la loi. »

« La corruption de la jeunesse, c’est un élément constitutif du viol parce que le juge a retenu ce qui est fondamental, qui est le fait de corrompre la volonté d’une personne et d’avoir des relations sexuelles avec elle. Les deux ayant lieu, le juge est libre de trancher », interprète ainsi M. Keïta.

Il rejette la thèse selon laquelle « ce dossier est un dossier complot » avant de déplorer le fait que M. Sonko a refusé de se faire vérifier en manquant de se présenter au Palais de justice le jour de l’audience.

Poursuivant son argumentation, M. Keïta salue le fait que « l’Etat est resté debout pour arriver au maintien de l’ordre et de la sécurité et tranquillité en toute lucidité. »

Abordant le sujet du Dialogue national, M. Cheikhna Cheikh Saad Bouh Keïta donne un coup de chapeau au Chef de l’Etat du fait qu’il dit qu’il n’y a pas de sujet de tabou, y compris le sujet d’une éventuelle candidature du président Macky Sall.

« L’objet sera ce qu’on aura atteint. C’est pas un objectif magnifique calé quelque part, mais le fait que le Dialogue va exister et va aboutir sur quelque chose », affirme M. Keïta.

Il conclut son entretien par faire une lecture sur les mutations notées dans l’espace politique sénégalais.

Selon le commissaire à la retraite, « il y a un nouveau type d’activistes de politiciens qui, malheureusement, ne croient ni au développement ni à la bonne marche de la République… Leurs manières de faire de la politique n’est rien d’autre que vouloir prendre le pouvoir par la rue, d’en profiter le maximum possible et de se mettre à l’abri. »